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Quand la Terre a commencé à respirer

On date généralement l’apparition des premiers êtres vivants capables de produire de l’oxygène à 2,3 millions d’années. Mais… les travaux sur lesquels s’est engagé Stefan Lalonde, géochimiste au laboratoire Géoscience Océan1, risquent fort d’avancer cette date de plusieurs millions d’années.

Il y a près de 4 milliards d’années, dans l’air de la Terre, flottaient de la vapeur d’eau et du carbone. L’oxygène n’y était alors présent que sous forme de traces et c’est grâce à l’apparition de bactéries photosynthétiques (capable de produire de l’oxygène grâce à l’énergie lumineuse et par assimilation du CO2) que cette atmosphère s’est transformée. Ces micro-organismes ont progressivement permis l’explosion de la vie…

À la recherche de fossiles plus vieux de 6 millions d’années

L’objectif de Stefan Lalonde n’est rien de moins que de mettre la main sur la plus ancienne trace de vie photosynthétique terrestre2 ! Pour l’instant, de nombreuses preuves attestent de la présence, il y a 2,3 milliards d’années, d’une multitude de bactéries productrices d’oxygène : c’est la grande oxygénation. Mais le chercheur en est persuadé, il est possible de trouver des traces bien antérieures. Les fossiles idéaux ont, selon lui, 2,9 milliards d’années et se situent au Nord-Est du Canada. Dans ce gisement, ce sont près de 450 m de sédiments d’origine biologique, ou stromatolithes, qui ont commencé à être forés en 2016 pour être ensuite analysés par le chercheur.

La plateforme PSO : une technologie de pointe au service de la recherche

La difficulté majeure est qu’à première vue, rien ne différencie les fossiles de bactéries capables de photosynthèse des autres… En effet, les stromatolithes sont élaborés par des centaines de micro-organismes différents et leur forme n’est pas représentative d’une espèce. Une fois ces échantillons ramenés au laboratoire, le chercheur brestois procédera à des analyses isotopiques poussées afin d’y détecter l’oxygène biogénique. Le financement européen3 de 1,85 million d’euros obtenu par le géochimiste permettra d’investir dans une instrumentation de pointe qui viendra compléter celle déjà existante du Pôle spectrométrie océan de Brest (UBO, CNRS, Ifremer).

 Ces nouvelles recherches, en plus d’améliorer la connaissance des mécanismes d’oxygénation terrestre, sont indispensables en exobiologie. Pour chercher de la vie à la surface d’autres planètes telles que Mars, il est obligatoire de connaître parfaitement celle de la Terre…

 

1 – Laboratoire Géoscience Océan (LGO) – UBO, CNRS, UBS
2- Ces travaux sont menés dans le cadre du projet EARTHBLOOM, dirigé par Stefan Lalonde
3- Ce financement a été obtenu dans le cadre d’une bourse ERC Starting Grant 2016 qui financera l’équipe de recherche de Stefan Lalonde sur une période de 5 ans.