Dimitris Visvikis félicité pour l’ensemble de sa vie scientifique par le prix Edward J Hoffman de la Société Américaine de la Médecine Nucléaire

Physicien de formation, Dimitris Visvikis, est aujourd’hui reconnu par ses pairs comme l’un des plus grands spécialistes de l’imagerie médicale nucléaire. Parmi les nombreux prix qui lui ont été décernés, l’un des plus prestigieux est certainement le prix Edward J Hoffman attribué en juillet dernier en reconnaissance de ses contributions majeures en recherche dans le domaine de l’imagerie TEP* et de son rôle prédominant dans la formation et la dissémination des connaissances dans la communauté scientifique.

« Toute ma formation universitaire s’est déroulée en Angleterre. J’ai d’abord fait une licence puis un master en physique des radiations. Lors de ma thèse je me suis ensuite spécialisé en imagerie nucléaire et notamment en imagerie par émission de positons, autrement appelée Tomographie par Emission de Positons (TEP) ». Dimitris a ainsi glissé du domaine de la physique fondamentale axé sur la détection de particules à l’application clinique des systèmes de détection. « En 1993 au début de ma thèse, je menais mes recherches à l’ICR (Institut of Cancer Research) c’était une réelle opportunité parce que contrairement au reste du monde l’Angleterre est le seul pays qui considère la physique médicale comme une spécialité universitaire ». À l’issue de sa thèse, Dimitris a passé deux ans à Cambridge pour monter une équipe et un centre d’imagerie TEP* à vocation essentiellement neurologique, il est ensuite resté cinq ans à Londres pour décliner ses compétences et appliquer ses connaissances dans le champ oncologique. Arrivé à Brest en 2003 il a créé l’équipe Action du LaTIM* dont l’objectif est l’intégration efficace de l’imagerie multimodale (TEP / TDM* / IRM*) dans le contexte thérapeutique en oncologie. Plusieurs axes sont développés. Le premier concerne l’amélioration de la précision quantitative et qualitative en imagerie afin d’identifier plus précisément les biomarqueurs qui permettront ensuite de choisir et d’évaluer un régime thérapeutique. Le deuxième porte sur l’extraction de biomarqueurs complétée par le développement de modèles multiparamétriques caractérisant les tumeurs avec une approche multimodale et multi-échelles.  Le troisième est dédié au domaine de la radiothérapie, qui, avec la chirurgie, représente l’option thérapeutique la plus utilisée en oncologie.

Apparition de l’imagerie multimodale TEP/TDM

Résultats de l’imagerie multimodale TEP/TDM

C’est en 2000, qu’une nouvelle révolution médicale a vus le jour avec l’émergence de l’imagerie multimodale, c’est-à-dire la combinaison de la radiologie (imagerie X) et de la TEP (imagerie nucléaire fonctionnelle). Une nouvelle génération de scanners née du mariage des deux technologies a pris une place prépondérante dans les investigations diagnostiques en oncologie. Cette technologie hybride procure des informations à la fois anatomiques et métaboliques. L’incorporation d’un scanner (radiologie X) permet de mieux déterminer la localisation anatomique des tissus présentant une anomalie métabolique. L’obtention simultanée des images s’avère nettement supérieure à l’information obtenue par l’acquisition de deux examens enregistrés séparément. Grâce à ce couplage de modalités la qualité des images reconstruites après analyses des données gagne en précision. Economiquement cette nouvelle approche a un impact majeur avec un nombre d’examens TEP qui ne cesse d’augmenter sur des machines de plus en plus rapides et efficaces pour un service médical toujours accru.

La prise en compte des mouvements respiratoires

En 2003, Dimitris a intégré l’Inserm* comme chargé puis directeur de recherche « j’ai été recruté avec un projet d’amélioration de ce qu’on appelle les aspects quantitatifs sur l’imagerie multimodale ou l’une des difficultés est liée au temps nécessaire à l’acquisition de données ».   En effet un examen réalisé par un scanner X est très rapide, une vingtaine de secondes pendant lesquelles le patient peut bloquer sa respiration, or un examen TEP requiert plusieurs minutes. Il est donc nécessaire de prendre en compte les mouvements respiratoires pendant l’examen dans la manière de représenter l’image et les informations fournies. Les méthodologies généralement proposées pour corriger le mouvement respiratoire sont basées sur l’utilisation d’acquisitions dynamiques synchronisées sur la respiration. C’est ainsi que Dimitris a travaillé sur de nouveaux algorithmes de reconstruction permettant de compenser les effets du mouvement respiratoire lui assurant la reconnaissance de ses pairs. « En prenant les données brutes, nous reconstruisons de plus en plus correctement les images en tenant compte des mouvements respiratoires. Nous pouvons ensuite faire des images améliorées en 3D afin de les utiliser pour créer des modèles prédictifs et pronostiques adaptés aux différents régimes thérapeutiques. »

Des acquisitions de données « corps entier » et l’Intelligence Artificielle en imagerie médicale

Jusque très récemment, il était impossible de réaliser des images du corps entier en une seule fois, mais un nouvel outil doté d’une nouvelle technologie vient de voir le jour. « Usuellement le champ de vue de l’imagerie TEP est d’environ 25 cm, nous sommes capables de produire des images du corps entier certes, mais tranche pas tranche. En élargissant le champ de vue axial d’un détecteur TEP nous pouvons obtenir une sensibilité accrue ».

L’heure est aujourd’hui à l’utilisation de l’intelligence artificielle, 80% des développements dans le LaTIM ont recours à cette technologie. « Nous passons des données brutes aux données reconstruites, ensuite des données reconstruites à la segmentation des images et à l’extraction des biomarqueurs sur les tumeurs segmentées vers la classification des groupes de patients. Chaque étape fait appel à l’intelligence artificielle. La recherche tend à supprimer des étapes intermédiaires pour passer des données brutes à la classification. Ce serait idéal, mais pour le moment, et pour ma part je pense qu’il est plus raisonnable d’envisager de partir des images pour arriver à la classification ».


  • TEP : Tomographie par Emission de Positons
  • LaTIM : Laboratoire de traitement de l’information médicale – UMR 1101 – UBO/IMTA/INSERM
  • TDM : Tomodensitométrie
  • IRM : Image par Résonnance Magnétique
  • Inserm : Institut national de la santé et de la recherche médicale